Flora (2 ans et demi) a été adoptée par Marie, déjà mère de deux enfants. La petite Ruby (3 ans), elle, vit désormais avec Chio, une cinquantenaire dont la progéniture est partie depuis longtemps. Ces deux cas seraient banals s’il ne s’agissait d’observations faites chez des bonobos. Certes, l’adoption n’est pas chose nouvelle chez les grands singes. Mais, jusqu’à présent, elle n’avait été observée qu’à l’intérieur d’un même groupe, avec par exemple des adoptions au sein d’une même fratrie ou dans des lignées apparentées. Ici, Flora et Ruby n’ont aucun lien avec leurs mères adoptives : elles viennent de groupes extérieurs. Les explications traditionnelles en termes d’intérêt ne fonctionnent donc pas. L’altruisme et l’amour des enfants sont peut-être les seules raisons de ces choix, qui impliquent pour les deux mamans un surcroît de fatigue. Des explications d’autant plus crédibles que les bonobos sont connus pour leur amour des enfants et leur empathie.
Sciences Humaines n°337, juin 2021
Nahoko Tokuyama et al., « Two wild female bonobos adopted infants from a different social group at Wamba », Scientific Reports, vol. XI, n° 1, 2021.