Après un ouvrage sur la maison d’édition de disque fondée en 1963 par Jean-Marie Le Pen, le chercheur Jonathan Thomas vient d’achever sa thèse consacrée au disque politique français des années 1930. L’usage politique de l’enregistrement est en germe dès l’invention du phonographe en 1878 – Thomas Edison proposait de l’utiliser pour conserver la voix des grands leaders. En France, cet usage est attesté dès le début du 20e siècle. Discours, musiques et chansons sont enregistrés par des entreprises proches des mouvements politiques. Ils sont destinés à l’usage privé ou diffusés lors des meetings pour amplifier la propagande, démultiplier la présence des orateurs – à une époque où les trajets sont lents et chers – et susciter l’émotion, comme lorsque résonne dans un meeting la parole d’un des témoins directs de l’assassinat de Jaurès. Jusqu’à la fin des années 1930, le disque a un rôle d’autant plus important que les autres moyens de captation du réel (radio, cinéma) sont peu accessibles aux organisations politiques. Par ce travail pionnier, qui interroge la dimension sonore de la communication politique, Jonathan Thomas témoigne du dynamisme des sound studies.
Jonathan Thomas, « Le disque politique en France (1929-1939) », thèse de l’EHESS, soutenue le 8 janvier 2021.
(Sciences Humaines n° 335, avril 2021)